Le Kea Trader, deux ans après

Le 12 juillet 2017, le Kea Trader s’échouait sur le récif Durand, à 90 km au sud-est de Maré. Deux ans plus tard, ce porte conteneur maltais est toujours encastré dans le corail mais il continue de se délabrer, au fil des mois. Où en sont les opérations de démantèlement, annoncées il y a an ?
Ce chantier titanesque devait débuter en juin, le temps pour la société Shanghai Salvage de construire une barge adaptée à ces travaux en faible profondeur. Baptisée Ca Li, elle mesure 125 mètres de long et accueillera un équipage d'une centaine de personnes.
Aujourd’hui, la barge est prête, mais la compagnie chinoise attend désormais le feu vert du comité scientifique du Parc naturel de la Mer de Corail, qui devra dire, si oui ou non, les impacts de ce chantier sur le récif Durand sont acceptables. 
 

Le remède pire que le mal ?

«  Depuis toujours, on cherche à voir si le remède ne sera pas pire que le mal » explique le capitaine de vaisseau Jean-Louis Fournier, commandant de la zone maritime. « C’est donc une entreprise qui a pignon sur rue, Polaris (une société américaine), qui est une entreprise environnementale, qui a fait une étude aux normes. Elle montre qu’un retrait de l’épave, à long terme, est plus bénéfique qu’un maintien de l’épave. Mais çà bien sûr, c’est la version de cette entreprise, et cette étude doit être soumise au comité scientifique pour une analyse plus approfondie ». 
La réponse du comité scientifique est attendue en août. En cas d’avis favorable, l’armateur devra trancher pour un démarrage des travaux avant ou après la saison cyclonique, sachant que ce chantier offshore devrait durer plus d’un an.
 

Une barge prototype

« Cette opération de démantèlement d’un navire en pleine mer, c’est tout à fait nouveau. La barge est un prototype » explique Thierry Cantéri, le directeur des affaires maritimes. « La barge est prévue pour être semi-submersible, c’est à dire qu’elle se positionne sur le récif, par un système de ballastes, elle se pose au fond, elle coule sur le fond, et des ancres sont déployées autour pour la stabiliser sur zone ». 
Déjà brisé en deux morceaux, le bateau doit être découpé sur place.
Puis il sera acheminé par la barge et des remorqueurs jusqu’à Nouméa où il devrait être entièrement démantelé.
Le chantier est estimé à plusieurs milliards de francs CFP.  
En attendant, la société Shanghaï Salvage Company est toujours sur le site pour sécuriser les morceaux du Kea Trader.
 

Les entreprises calédoniennes veulent participer

Les entreprises calédoniennes, elles, regrettent de ne pas être associées aux opérations, comme ce fut le cas les premiers mois qui ont suivi l’échouement.
« Un peu de déception, oui » concède Laurent Raffet, le directeur d’une compagnie de remorquage. « Outre la partie chiffre d’affaires, c’est un travail intéressant qu’on n’aura pas forcément l’occasion de refaire tous les jours. C’est un événement certes tragique mais qui reste exceptionnel au niveau mondial. Donc pour toutes les entreprises qui ont pu travailler sur cet échouement, je pense qu’on a déjà pu montrer qu’on avait un certain savoir-faire local, des moyens locaux, il y a eu vraiment des retombées, en ce qui nous concerne, pour nos équipages, et même pour nos équipes à terre, c’était quelque chose de très intéressant, on a beaucoup appris et forcément, on est demandeur de ce genre d’expérience. »
 

Un peu tôt

Pour Thierry Cantéri, directeur des affaires maritimes, les entreprises locales seront bien mobilisées mais pas dans l’immédiat.
« L’entreprise chinoise est retenue depuis plus d’un an, elle a fait l’objet d’un appel d’offre international. Ce sont des procédures tout à fait normées dans ce genre de chose, c’est l’assureur qui trouve la société qui est la plus à même d’effectuer les travaux. Après, il y aura inévitablement des sociétés calédoniennes qui seront mobilisées, soit pour le découpage à terre des métaux rapportés, soit aussi probablement mobilisation de remorqueurs quand la barge sera ramenée, etc. Donc il y aura une mobilisation d’acteurs calédoniens, mais il est encore un petit peu tôt pour que ce soit fait, puisque le calendrier doit s’affiner, c’est pour cela que les choses ne sont pas encore précisées du côté des opérateurs économiques calédoniens. »
Le point avec Olivier Jonemann et José Solia 
©nouvellecaledonie